Pénurie de perches du Léman dans les filets des pêcheurs.
C’est un début de saison difficile pour la pêche et les restos qui privilégient les filets de perches .
Certains clients sont même insultants .
« Un client sur trois à qui on répond que nous n’avons plus de filets de perches du lac Léman ne prend pas sa réservation.
Et certains nous raccrochent au nez ou nous engueulent « remarque Olivier Dalmier , patron du restaurant la Passade a Perroy dans le district de Nyon dans le canton Vaudois , quelque peu contrarié par ces réactions irrespectueuses.
Il y a pénurie de perches, c’est vrai .
Mais il n’y peut rien.
Ni les pêcheurs d’ailleurs.
Sans oublier qu’il y a d’autres excellents poissons du Léman à déguster comme la féra ou le brochet .
Et que les filets de perche de Pologne ou d’Irlande sont aussi très bons .
Du côté des pêcheurs, on se montre plus fataliste.
C’est dans leur nature.
Mais, tout de même, il y a un certain ras le bol «
Quand des clients lancent les cartes du menu et quittent leur table en insultant le serveur, ça nous dépite « râle un bon coup Serge Guidoux , pêcheur professionnel à Ouchy .
Il n’y a aucune raison de se montrer agressif, surtout quand on sait que 90% des filets de perches viennent de l’étranger
On fait le maximum pour ramener du frais et à la fin , on se fait encore engueuler , c’est infernal .
Les clients qui ne mangent que des filets de perches nous pourrissent la vie « rajoute-il .
La star des terrasses du lac a tellement de succès que les amateurs de ce plat semblent oublier qu’il s’agit d’une pêche de poissons sauvages, rappellent les professionnels.
« Ce début d’année, elles ne sont pas là , confirme Jean Pierre Manigley , pêcheur à Rolle .
Ce matin dit il j’ai remonté 1kg de perches alors que j’en faisais 15 à 18kg l’année dernière.
C’est peut-être dû à la température du lac qui est resté plus longtemps froid .
Ou alors le frai s’est mal passé il y a deux ou trois ans , il y a des cycles naturels . ».
Étrange mortalité en 2014.
Conservateur de la pêche à l’état de Vaud ,Frédéric Hofmann estime que le tonnage capturé ce printemps ne représente que le tiers de celui observé en 2013 sur le Léman.
Il avance plusieurs hypothèses pour tenter d’expliquer le phénomène.
« Il faut d’abord constater que le lac a vécu un début d’année plus frais, donc plus tardif d’environ deux semaines pour la période de reproduction.
Les perches vont certainement réapparaître dans les nasses et les filets d’ici quelques semaines.
Il semblerait également que les bancs de perches se tiennent plus au large , la ou la nourriture serait plus abondante.
Enfin l’an dernier, on a constaté une forte mortalité de poissons juvéniles de 1an , sans pouvoir en déterminer la cause. .
Pas tenté de tricher .
Lui aussi tient à rappeler que les poissons n’échappent pas aux aléas climatiques et aux cycles naturels d’un peuplement.
Mais on ne tire pas la sonnette d’alarme. Le lac est globalement en bonne santé et nous observons beaucoup de jeunes perches cette année.
De toute façon, la bonne saison de pêche pour cette espèce débute maintenant jusqu’à l’automne.
Il y a donc fort à parier que nous tiendrons un autre discours après l’été .
Nous ferons le bilan en fin d’année. .
Frédéric Hofmann fait appel au bon sens des pêcheurs, qui doivent anticiper ces creux comme un paysan pour une mauvaise récolte .
Et les restaurateurs savent qu’il ne faut pas tout miser sur les filets de perches.
Blaise Baetscher , du restaurant le rivage a Lutry à par exemple choisi de se spécialiser dans la fera .
« Comme cela , je ne suis pas inquiet de ne pas en avoir et je ne suis pas tenté de tricher en servant du poisson provenant de l’étranger sans l’annoncer. »
90 % des perches viennent de l’étranger.
Les pêcheurs du Léman que ça soit du côté Suisse ou du côté Français le répètent souvent pour que les consommateurs comprennent la situation : plus de 90% des perches qui finissent dans leurs assiettes proviennent de l’étranger, et une petite partie d’une pisciculture.
Patron de l’entreprise Borex Poissons , Pascal Crottet , en tant que grossiste, importe du poisson de l’étranger .
« Que ça soit du frais ou du congelé , il y a plusieurs provenances pour les perches.
En frais , la meilleure qualité vient de l’Irlande .
Sincèrement on ne voit pas la différence avec nos perches du lac Léman.
Il y a aussi des perches fraîches et congelées qui viennent des lacs de Pologne et de l’Estonie .
On trouve également des perches congelées du Kazakhstan et de la Russie. »
Ce que regrette et condamne Pascal Crottet c’est le manque de transparence des restaurateurs.
« La plupart n’indiquent pas leur origine. ».
« Les gens sont souvent trompés sur l’origine, c’est malheureux. »
Et la perche d’élevage ?
Il semble que ça soit aussi compliqué que de cultiver des morilles .
L’entreprise Valperca SA tente pourtant de relever le défi avec un certain succès.
Croulant sous les demandes, elle entend doubler sa production d’environ 75 tonnes par an ( 1,5 million de perchettes , 3,5% du marché)
La firme piscicole utilise deux sites . La première étape se déroule à Chavornay , où il y a 12 phases de ponte par an .
A 4 mois , les perchettes sont acheminées par camion à Rarogne .
Les poissons y restent huit mois avant de se retrouver sur les étals des restaurants et dans la grande distribution.
Source 24 heures .