On observe une tendance au cumul des labels sur le marché de la consommation dite responsable.
Dans ce contexte, les produits issus du commerce équitable se voient parfois parés de garanties environnementales (Rainforest Alliance, Smithsonian Bird Friendly…) en plus des différents labels du commerce équitable (Fairtrade Max Havelaar, Ecocert Équitable…).
Parallèlement, un certain renforcement des critères environnementaux a été opéré au niveau des référentiels du commerce équitable.
Déjà dans les années 1990, la stratégie des importateurs du commerce équitable a consisté à proposer des produits à la fois équitables et biologiques afin d’augmenter leurs débouchés.
Aujourd’hui, ce sont d’autres garanties telles que le maintien de la biodiversité ou encore la compensation carbone (réduction des émissions de CO2) qui sont mises en avant, conduisant à des processus de double, voire de triple, labellisation.
Ce mouvement est d’autant plus important pour le commerce équitable que la dimension environnementale est fortement liée aux motivations et comportements d’achat des consommateurs du commerce équitable (Connolly et Shaw, 2006 ; De Ferran, 2006 ; Tagbata, 2006).
Par ailleurs, le renforcement et la clarification des critères environnementaux du commerce équitable constituent une stratégie qui pourrait permettre d’atténuer l’impact d’une perte potentielle de confiance sur ses dimensions socio-économiques.
En effet, comme tout système basé sur la confiance, le commerce équitable reste fondamentalement fragile.
De fait, le scepticisme est une variable prédictive de l’intention d’achat de produits équitables (Pernin et Petitprêtre, 2012 ; De Pelsmacker et Janssens, 2007 ; Sirieix et al., 2004).
1. COMMERCE ÉQUITABLE ET ENVIRONNEMENT
Si le commerce équitable a initialement été développé pour assurer des prix justes et une meilleure équité dans le commerce pour les petits producteurs, il n’empêche qu’il intègre aussi, et de plus en plus, des critères environnementaux en plus des critères socio-économiques.
Le consensus FINE [3] intègre d’ailleurs la dimension environnementale, à travers la référence au développement durable, dans la définition du commerce équitable.
Si « la question des coûts écologiques de production, de transport et de distribution des produits est longtemps apparue comme secondaire face à l’urgence du besoin des populations du Sud, avec l’émergence des préoccupations liées à l’environnement dans les années 1970 et l’accroissement spectaculaire de la notoriété du terme de développement durable à la fin des années 1990, les acteurs du commerce équitable se sont attentivement penchés sur cette dimension de leur action, sans pour autant chercher à se substituer aux mouvements de certification biologique déjà existants » (Diaz Pedregal, 2006).
Les acteurs du commerce équitable ont été critiqués (par les partisans de la décroissance notamment) sur les conséquences environnementales de leurs pratiques, en particulier au niveau de la pollution liée au transport et sur la question de l’épuisement des sols et de la perte de biodiversité liés à la promotion de monocultures commerciales dirigées vers l’exportation (Ramonjy, 2012 ; Diaz Pedregal, 2010).
Comme le soulignait en 2009 D’Andlau, président de la Plate-forme française du commerce équitable (PFCE) :
« le mouvement international du commerce équitable doit aujourd’hui se saisir pleinement des enjeux environnementaux s’il veut que ses engagements de développement restent valides dans les profondes évolutions mondiales que nous vivons actuellement » .
La PFCE a justement révisé en 2008 sa charte de principes pour y inclure une section sur le respect de l’environnement et s’est engagée en 2009-2011 dans un projet environnemental qui s’est traduit par la réalisation de diagnostics environnementaux, de bilans carbone, de plans d’action pour prévenir et réduire les impacts, mais aussi par des formations à la réduction des déchets, à l’éco conception, à l’éco management, par des journées interprofessionnelles (sur le changement climatique, la biodiversité), ainsi que par la publication de guides pratiques et d’outils de sensibilisation.
Par ailleurs, on peut constater au niveau de la certification que près de la moitié des producteurs labellisés Fairtrade Max Havelaar étaient aussi certifiés « agriculture biologique » en 2010.
Au-delà de l’association entre les labels du commerce équitable et de l’agriculture biologique, des processus de triple labellisation sont parfois à l’œuvre.
Les cahiers des charges des différents labels du commerce équitable se sont aussi progressivement rapprochés de ceux de l’agriculture biologique, puis des labels environnementaux concurrents, comme Rainforest Alliance.
L’agriculture biologique, dans sa dynamique d’industrialisation, n’apporte plus forcément de bonnes garanties en termes de protection de la biodiversité et le recours à ces labels supplémentaires constitue une stratégie environnementale pour certaines entreprises.
Longtemps marginale, la question de l’impact environnemental du commerce équitable est donc aujourd’hui abordée avec beaucoup plus d’intérêt par les différents acteurs du commerce équitable.
Les deux principaux labels du commerce équitable pour le café en France sont les labels Fairtrade Max Havelaar et Ecocert Équitable. Fairtrade Max Havelaar est le label de commerce équitable le plus ancien et le plus connu au niveau mondial.
Ce premier label, destiné au café équitable, a été lancé en 1988 en Hollande et la Fédération Fairtrade International a été fondée en 1997.
Elle rassemble 19 initiatives nationales de certification.
C’est la fédération qui est chargée de la définition et de la révision de l’ensemble des standards servant à la certification pour l’attribution du label Fairtrade Max Havelaar.
Le label Ecocert Équitable a, pour sa part, été lancé en France en 2010 pour la certification des produits à la fois biologiques et équitables.
Il est contrôlé par l’organisme certificateur Ecocert.
En ce qui concerne le café labellisé Fairtrade Max Havelaar, les standards environnementaux qui s’appliquent sont ceux contenus dans la nouvelle version des « standards du commerce équitable Fairtrade pour les organisations de petits producteurs » (Fairtrade International, 2011).
Ces nouveaux cahiers des charges, ou standards, sont entrés en application en juillet 2011.
Ils sont liés à la révision stratégique du système de la Fédération Fairtrade au niveau international.
Le standard « produit » correspondant, c’est-à-dire le standard du commerce équitable Fairtrade pour le café, ne contient pas de critères environnementaux supplémentaires.
Les « standards du commerce équitable Fairtrade pour les organisations de petits producteurs » (ci-après les standards Fairtrade) ont été réorganisés en quatre chapitres dont l’un, le chapitre 3, porte sur les pratiques de production « durables et éthiques », incluant des critères sur l’environnement, ainsi que sur les conditions de travail.
Ces critères environnementaux se divisent en deux catégories : les critères centraux (doivent être respectés dès l’entrée dans le système Fairtrade Max Havelaar) et les critères de développement (soumis à une évaluation en fonction du plan de développement proposé par les producteurs).
Cette nouvelle distinction remplace l’ancienne distinction entre les critères minima et les critères de progrès.
Pour ce qui est du label Ecocert Équitable, le cahier des charges, ou référentiel « ESR – Équitable, Solidaire, Responsable » s’applique aux produits alimentaires, cosmétiques et textiles qui répondent à la fois aux critères de l’agriculture biologique et du commerce équitable (Ecocert, 2010).
Ils sont donc communs à tous les produits.
Par ailleurs, un produit non certifié « agriculture biologique » ne peut pas arborer le label « Ecocert Équitable ».
Depuis 2010, l’attribution du label Bio Équitable est lui aussi soumis au respect du référentiel ESR, suite au rapprochement entre l’association Bio Partenaire et l’organisme certificateur Ecocert. Similairement aux standards Fairtrade Max Havelaar, il existe une graduation dans le degré d’application des critères du référentiel d’Ecocert.
Les « exigences minimales » sont celles que les opérateurs doivent remplir pour pouvoir s’engager dans la démarche ESR.
Les « exigences générales » doivent, pour leur part, être remplies au cours de la première année après l’engagement dans la démarche ESR.
Les opérateurs doivent, par ailleurs, se conformer aux « exigences de progrès » par des améliorations continues.
Les critères de développement des standards Fairtrade, tout comme les anciens critères de progrès, ne constituent pas une véritable garantie pour les consommateurs puisque leur application varie en fonction des organisations considérées.
Il en est de même pour les exigences de progrès du référentiel Ecocert.