Cependant par an les attaques de requins font moins de morts que les selfies.

Ces dernières années, les attaques imputées aux requins semblent s’être multipliées à travers le monde avec des témoignages particulièrement choquants. 

Recrudescence d’agressivité ? 

Réponse aux changements de leur écosystème ? 

Que faut-il en penser alors que de nombreuses espèces de requins sont maintenant au bord de l’extinction ?

Les requins sont apparus voilà 430 millions d’année et l’on dénombre actuellement 465 espèces de requins dont la taille varie entre 15 cm (sagre elfe) à 20 m (requin baleine). 

Seule une douzaine d’espèces sont responsables des agressions contre des humains, par méprise ou opportunisme.

Les espèces de requins dangereux pour l’Homme

Seules cinq espèces de requins sont qualifiées de dangereuses compte tenu de leur taille et de leur régime alimentaire :

le requin tigre 

le requin blanc

Le plus impressionnant des requins mangeurs d’Homme.

Heureusement il est visible de loin car il nage souvent sous la surface, trahit par sa nageoire dorsale qui sort de l’eau ;

le requin bouledogue 

Un requin qui vit près des côtes à l’origine d’attaques imprévisibles car il fonce sur ses proies isolées en remontant des fonds marins qu’il rase. 

Il peut attaquer l’Homme même avec un mètre d’eau ;

le requin mako

le requin longimane 

Soupçonné d’avoir décimé des centaines de naufragés lors des guerres du Pacifique de la seconde guerre mondiale.

Or, le nombre d’attaques recensées a plus que doublé depuis 1980, selon la base de données Global Shark Attack :

Nombre d’attaques de requins recensées par an.

Source : Global Shark Attack

Période Nombre d’attaques par an

1980 à 1990 42

1990 à 2000 56

2000 à 2010 97

Depuis entre 110 et 150

Si les requins se répartissent sur presque toutes les mers du globe, certains pays sont plus touchés, comme l’Australie qui déplorait, fin 2013, 7 attaques mortelles de requins en 3 ans. 

Résultat : tout animal de plus de 3 mètres approchant de ses côtes occidentales de l’Australie est tué avec des lignes d’appât disposées le long du littoral…

Quelques attaques de requins récentes et choquantes

Le 15 juillet 2013, une adolescente de 15 ans a été tuée par un requin, alors qu’elle se baignait dans la baie de Saint-Paul, sur l’île de la Réunion. 

Gina Hoarau, directrice de la sécurité publique à Saint-Paul, indique que « les conditions de cette attaque sont surprenantes. 

On ne pensait pas qu’un requin pouvait venir si près de la côte ». 

Toutefois, la baignade était interdite à cet endroit non protégé par la barrière de corail, même si la signalisation était déficiente.

Le 8 mai 2013, un surfeur a succombé à ses blessures après une attaque, en face de la plage des Brisants (Saint-Gilles-les-Bains), sur la côte ouest de l’île de la Réunion.

Le 19 septembre 2011, l’ancien champion de France de bodyboard Mathieu Schiller a été tué par un requin bouledogue de 4 mètres de long au large de la plage de Boucan-Canot, à Saint-Paul, sur l’île de la Réunion. 

La préfecture souligne dans un rapport du 24 septembre 2011 que « la concentration dans le temps et dans l’espace d’attaques de requins au large de Saint-Gilles est exceptionnelle et difficilement explicable ». 

Ce drame aurait engendré une véritable chasse aux requins.

Le 23 août 2011, un surfeur sud-africain est mort après avoir été attaqué par un requin au large de Plettenberg Bay, sur la côte sud de l’Afrique du Sud.

Mi-août 2011, deux hommes ont été agressés par des requins en vingt-quatre heures dans le territoire du Primorié (Extrême-Orient russe), le fait étonnant est qu’auparavant aucune attaque de ce prédateur n’avait été enregistrée dans cette région.

 « Chaque année, dans la seconde moitié de l’été des groupes de requins s’installent dans les eaux de la région de Khasanski (Primorié) où des milliers de salariés passent leurs vacances », a indiqué à RIA Novosti Alexandre Sokolovski, docteur en biologie, avant de souligner que dans le passé, ces prédateurs ne s’en prenaient pas aux baigneurs.

Sur la même période un jeune touriste anglais en lune de miel a été dévoré aux Seychelles. 

Cet événement tragique survient à l’endroit même où un Français avait perdu la vie deux semaines plus tôt.

En décembre 2010, plusieurs cas similaires ont été enregistrés à Charm el-Cheikh, en Egypte.

19 juillet 2015 : un champion de surf est attaqué

Les surfeurs sont régulièrement attaqués par les requins et certains sont tués ou mutilés à vie. 

En plein direct, le surfeur australien Mick Fanning (triple champion du monde), qui disputait la finale du J-Bay Open 2015 (à Jeffreys Bay, en Afrique du Sud) face à Julian Wilson, s’est fait attaquer par un requin.

Heureusement, il en ressort indemne comme en témoigne la vidéo de l’attaque :

Le champion s’en est sorti en assénant des coups de poings sur le dos du squale et en utilisant sa planche comme bouclier. 

De plus, il a bénéficié de l’intervention rapide des organisateurs qui encadraient la compétition. 

Dans la grande majorité des cas, les surfeurs n’ont pas cette chance…

Autre exemple : le 22 juillet 2015, un surfeur habitué des lieux de 45 ans a été attaqué à Saint-Leu (La Réunion). 

Il a été sévèrement mordu au biceps et à l’avant-bras droits. Heureusement, les secours l’ont rapidement pris en charge. 

Ce drame s’est produit dans une « eau claire », dans de « très bonnes conditions », précisent les maîtres nageurs sauveteurs de la commune. 

Toutefois, le surfeur évoluait dans des eaux interdites à la baignade à cause des requins…

Autre drame : le 25 juillet 2015, un pêcheur de coquilles Saint-Jacques a été tué, probablement par un grand requin blanc, au large de l’île Maria, dans l’Etat de Tasmanie, dans une zone qui n’est pourtant pas réputée pour être dangereuse…

Le 21 février et le 29 avril 2017, deux jeunes bodyboardeurs ont été tués à l’île de la Réunion, dans des zones pourtant totalement interdites à la baignade et aux activités nautiques.

Les requins sont-ils devenus plus agressifs ?

Plusieurs hypothèses, qui peuvent être complémentaires, sont avancées pour expliquer cette recrudescence relative des attaques envers l’Homme :

Le nombre de touristes, de plagistes, de plongeurs et de surfeurs a considérablement augmenté sur les littoraux, multipliant les occasions de rencontre avec des requins. 

D’ordinaire craintifs, les requins ont pu s’habituer à la présence de l’Homme et devenir plus curieux. 

A ce titre, sur l’île de la Réunion, un plagiste réunionnais nous confiait en septembre 2015 que les touristes et les métropolitains prenaient beaucoup plus de risques que les habitants.

Dans certains cas, la signalisation et/ou l’information sur la présence de requins est déficiente, parfois volontairement pour ne pas alarmer la population et les touristes comme en témoigne cette note interne de la Mairie de Saint Paul (La Réunion) du 22 décembre 2008 à destination des maîtres-nageurs sauveteurs des plages de la Ville.

Les surfeurs sont souvent confondus avec des tortues ou des phoques, des proies potentielles pour les requins.

L’explosion des loisirs à sensation forte comme le « baiting » et « shark feeding » qui consistent à appâter et nourrir les requins pour les voir au plus près. 

Ces pratiques restent très controversées car elles modifient sensiblement le comportement des requins qui s’aventurent ensuite davantage près des baigneurs. 

De plus, ces loisirs sont dangereux, surtout pour les requins qui peuvent être blessés par les cages et les bateaux. 

Par contre, elles permettent de maintenir, localement, les populations de grands requins, qui, vivants, acquièrent une valeur marchande plus importante que s’ils étaient pêchés.

L’augmentation de la température des eaux, conséquence du réchauffement climatique, qui entraîne le déplacement des requins vers le nord, en réaction à la migration de leurs proies.

C’est une des causes évoquées par Konstantin Zgourovski, du WWF Russie, suite aux deux attaques recensées dans la région du Primorié.

La raréfaction des proies dans le milieu naturel des requins à cause de la surexploitation des fonds marins par la pêche. 

Les requins s’aventurent alors dans d’autres milieux pour trouver leur nourriture, indique Magdi al-Alwani, spécialiste égyptien de l’environnement[5].

L’attrait des requins pour les déchets alimentaires que nous rejetons directement dans la mer, un peu comme les ours et d’autres opportunistes qui fouillent dans les poubelles et les décharges. 

Certains ports rejettent, alors que c’est souvent interdit, leurs effluents et déchets de poissons à quelques centaines de mètres seulement de spots de surf très fréquentés.

L’agriculture sur le littoral pourrait également profiter aux requins. 

C’est une hypothèse sur l’île de la Réunion où l’irrigation de la canne à sucre entraîne la formation d’eaux saumâtres et douces dans les estuaires, ce qu’affectionne particulièrement le requin bouledogue, capable de remonter les fleuves sur plus de 100 km !

La mise en place de d’Aires Marines Protégées (AMP) suspectées de profiter aux requins qui y trouveraient refuge et des proies plus abondantes. 

Si, la réserve marine de la baie de Saint Paul (île de la Réunion, création en 2007), empiète bien sur la zone de baignade, « elle n’a pas vu sa biomasse[2] augmenter », nous explique Nicolas Le Bianic, chargé de la prévention requin à la préfecture de la Réunion.

Cependant, la pêche aux requins y est interdite depuis l’apparition de cas de cigautéra, une intoxication alimentaire liée à la consommation de poissons, même frais. 

Les requins peuvent donc se reproduire davantage et la préfecture met en place des appâts sélectifs pour réguler les populations.

Enfin, l’ère de l’information et de l’Internet facilite le recensement des attaques à travers le monde et il est tout à fait possible que le nombre d’attaque relevé soit plus exhaustif qu’auparavant.

Pour mieux comprendre les raisons qui expliquent les attaques de requins et éviter les discours démagogiques et les solutions dévastatrices pour le vivant, l’association de défense de la vie marine, Sea Shepherd propose un dossier sur les attaques de requins à l’île de la Réunion.

Comment éviter les attaques de requins ?

Pendant que les experts s’interrogent sur les facteurs à l’origine de l’augmentation des attaques, retenons quelques règles pratiques pour les nageurs et tous ceux qui souhaitent profiter de la mer.

Bien respecter les consignes de sécurité et ne jamais se baigner dans des zones non surveillées et/ou interdites. 

Sur l’île de la Réunion, les forces de l’ordre peuvent verbaliser les plus intrépides ; heureusement, la grande majorité des plagistes que nous avons rencontrés restent prudents et ne font que tremper leurs pieds.

Certaines zones dangereuses mais touristiques sont équipées de filets anti-requins comme sur la plage de Boucan-Canot (île de la Réunion) depuis l’attaque de 2011. 

Solidement ancrés sur le plancher littoral, ils semblent efficaces puisque aucune attaque n’a été enregistrée dans ces zones protégées. 

Tressés avec des mailles de 40 x 40 cm, ces filets n’affectent pas les autres espèces marines. 

C’est pourquoi, ils vont être multipliés sur l’île pour répondre à l’afflux touristique, première ressource économique de la Réunion.

Eviter au maximum les eaux troubles. Si vous êtes surfeur, ne vous mettez pas en danger en pratiquant votre passion dans des eaux sans visibilité.

Si vous voyez un requin, l’essentiel est de garder votre calme et d’éviter tout mouvement brusque. 

Au lieu de paniquer, il faut s’éloigner calmement du requin, en lui faisant face, voire en lui brandissant un objet dur qu’il puisse « goûter ».

 L’essentiel est de ne pas se positionner comme une victime potentielle : la fuite éperdue signifie au requin que vous êtes une proie 

Plus facile à dire qu’à faire, je vous l’accorde…

Et pourtant, les requins sont proches de l’extinction

Selon les conclusions d’une étude scientifique publiée dans la revue Marine Policy, le nombre de requins tués chaque année dans les pêcheries commerciales est estimé à 100 millions, principalement pour faire vivre le marché mondial des ailerons de requin où le « shark finning » (prélèvement des nageoires d’un requin et rejet du reste de la carcasse en mer) est monnaie courante. 

Les ailerons, utilisés dans le potage aux ailerons de requin, plat traditionnel asiatique, représentent un des produits de la pêche les plus précieux au monde.

 Le prix des ailerons de requin a atteint plus de 700 dollars US le kilo en 2011, selon l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).

Résultat : 30 sur les 500 espèces de requins identifiées sont menacées d’extinction ou de quasi-extinction selon l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN). 

La plupart des stocks de squales connus ont diminué de 80 à 99% depuis les débuts de la pêche industrielle, au milieu du XXe siècle. 

Malheureusement, ce génocide animal n’est pas sans conséquences comme en témoigne le cas de la côte nord-est des Etats-Unis 

La raréfaction de requins dans cette zone a multiplié la présence de raies qui ont fait petit à petit disparaître le gisement de pétoncles centenaire présent. 

Ou encore en Nouvelle-Zélande, les poulpes de plus en plus nombreux dévorent les langoustes…

 Un manque à gagner pour les pêcheurs.

Ainsi, la pêche aux requins est particulièrement cruelle, destructrice pour les écosystèmes et de nombreuses autres espèces, tout en étant totalement disproportionnée et futile.

A ce titre, Shark Alliance, une coalition de plus de 100 organisations engagées dans la restauration et la protection des populations de requins, a lancé le 18 août 2011 une pétition qui appelle les ministres européens de la pêche à donner leur appui à la protection des requins face à la surexploitation et à renforcer de toute urgence le règlement de l’UE qui interdit le gaspillage consistant à pratiquer le shark finning. 

En effet, la pêche au requin se poursuit sans connaître de limite dans l’UE : nombre d’espèces menacées demeurent sans protection et l’interdiction du finning dans l’UE n’est pas forcément bien respectée.

Les requins : un maillon essentiel de la biodiversité marine

Rappelons enfin que les requins, aussi effrayants qu’ils puissent être (bien souvent à cause de l’image véhiculée par les films et les médias en manque de sensationnalisme), contribuent, depuis plus de 430 millions d’années à l’équilibre de la chaîne alimentaire et donc de nos précieux écosystèmes marins.

En effet, « les requins sont situés au sommet des chaines alimentaires. 

Ces « super » prédateurs jouent un rôle essentiel dans toutes les mers du monde. 

Ils mangent des poissons carnivores qui eux-mêmes consomment des herbivores.

 Lorsque les requins disparaissent, les espèces dont ils se nourrissent pullulent, mangent beaucoup plus d’herbivores et les algues prolifèrent étouffant les coraux, obstruant les baies. 

Tout l’équilibre fragile du milieu marin est perturbé. » indique le Centre National de la Mer NAUSICAA qui demande à l’Australie de « cesser cette tuerie de requins ».

Enfin, Robert Calcagno, directeur de l’Institut océanographique Fondation Albert-Ier-Prince-de-Monaco, organisme qui s’engage pour défendre les requins, rappelle dans un entretien donné au journal Le Monde que les requins « sont responsables d’une dizaine de décès par an. Les moustiques, eux, en provoquent 80 000 fois plus ». 

Cette réalité, dramatique, est pourtant bien moins choquante que d’assister à l’attaque d’un requin, nuance Nicolas Le Bianic. 

Ce qui explique les chasses, spontanées et aveugles, dont ils peuvent faire l’objet lorsqu’un drame survient.

Enfin, en prélevant de manière inconsidérée les requins et des quantités incroyables de poissons, les océans se vident littéralement pour laisser la place aux méduses, qui tuent déjà cinq fois plus que les requins…

 

 

 

 

Source : notre planète info

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