Un corbeau est même capable de se servir d’outils.

La mauvaise réputation

Dans l’histoire de la peinture, ils sont présents dans tous les tableaux de champs de batailles et dans tous ceux de paysages désolés d’hiver. 

Ils symbolisent la tristesse et le malheur. 

Suprême opprobre, ils ont même donné leur nom aux dénonciateurs anonymes.

De robe noir jais, croassant fort, souvent en très grand nombre et volontiers charognards, il n’est guère étonnant que du temps où la superstition remplaçait la science, ils aient reçu une telle charge symbolique, mais totalement injustifiée. 

En cela, ils ont connu le sort de bien d’autres animaux:chouettes effraies, chauves-souris, crapauds, couleuvres et bien sûr le loup.

En réalité pourtant, les corbeaux ont des comportements qui sont ou étaient considérés comme des vertus par les hommes: fidélité, courage, prudence, intelligence et sociabilité. 

Les couples restent unis pour la vie. 

Ces oiseaux n’hésitent pas à houspiller les rapaces, dont leurs prédateurs, l’autour des palombes, le faucon pèlerin et le hibou grand duc. 

Le plus grand rapace d’Europe, le pygargue à queue blanche, hivernant sur les étangs du Saulnois ne les impressionne pas non plus. 

Bravant le danger sur les routes pour se nourrir des animaux écrasés, jamais ils ne se font happer ; de même que s’aventurant jusqu’au milieu de nos jardins urbains, ils déguerpissent au premier mouvement de porte ou de fenêtre.

Par corbeaux, on entend communément dans nos régions, trois espèces très différentes. 

La corneille noire, le corbeau freux et accessoirement le choucas des tours. 

La corneille noire est parmi ces espèces familières, la plus grande. 

Elle est entièrement noire, yeux et bec compris. 

Celui-ci est puissant avec une mandibule supérieure bombée et recouverte à la base de plumes. 

Le corbeau freux, noir également, a cependant le bec en partie gris, apparaissant plus long car dégarni de plumes à sa base, ce qui fait paraître une zone de peau nue blanc-grisâtre. 

Autres signes distinctifs par rapport à la corneille, le front plat et le crâne pointu ainsi que le plumage du ventre recouvrant le haut des pattes comme un genre de bermuda trop large. 

Le choucas des tours se démarque nettement de ses cousins. 

Plus petit, il a la nuque gris clair et l’iris gris pâle, très visible dans le masque noir.

Tous les trois ont en commun d’être d’excellents voiliers, capables de toutes les figures de haute-voltige, le plus acrobate étant le choucas des tours. 

Celui-ci a adopté les édifices de nos villes où il a trouvé, pour nicher, l’équivalent des falaises naturelles, son milieu d’origine 

Il y trouve également une pitance de déchets plus abondante, alors que les campagnes sont largement expurgées des insectes et micro-mammifères par les traitements chimiques.

Le principal atout, commun à ces trois espèces, est précisément d’être largement omnivores

Graines de céréales, baies, fruits. légumes, mollusques, lombrics, insectes à tout stade, oeufs, oisillons, grenouilles, petits mammifères, charognes et détritus divers. 

Le corbeau freux a une prédilection pour les graines perdues après la moisson ou en germination d’automne. 

A ce dernier titre, on le qualifie volontiers de nuisible. 

C’était vrai dans les siècles passés où les rendements étaient très faibles et les pénuries fréquentes.

Aujourd’hui leur prétendue nuisance n’empêche en aucun cas de produire à hauts rendements, des céréales en surabondance.

Parmi ces trois espèces, tous les oiseaux nicheurs dans notre région, y sont sédentaires toute l’année.

Les importantes fluctuations de population de corneilles noires et de corbeaux freux entre l’été et l’hiver sont dues à l’arrivée massive en mauvaise saison des congénères ayant fui les rigueurs climatiques de l’Europe du Nord.

En hiver, leur plus grand nombre, leur errance à la recherche de nourriture, ainsi que le dépouillement de la nature, rend leurs évolutions plus spectaculaires, voire impressionnantes. 

Avec les étourneaux, ils représentent la seule manifestation de vie dans nos vastes et monotones espaces agricoles.

Même pendant la belle saison, les corbeaux freux et les choucas des tours, souvent associés aux premiers, sont toujours en bandes plus ou moins abondantes alors que les corneilles noires se déplacent à cette période seules ou en couple. 

En recherche de pitance, la corneille noire et le choucas des tours sont à tendance urbaine plus marquée que le corbeau freux plus franchement rural, même si ce dernier s’installe volontiers en dortoirs importants dans les grands arbres à proximité des cités. 

Ceci, au grand dam des riverains agacés par leurs croassements, alors qu’en matière de bruit, ils sont largement supplantés par les deux-roues aux pots d’échappement bricolés qui sillonnent nos rues

Toutes ces espèces sont constituées d’ oiseaux intelligents. 

Bien des observations le prouvent et notamment celle qui permet de voir des corbeaux ayant chapardé des noix, les laisser choir de haut sur une surface de rocher ou de béton pour en briser la coque.

Se fiant à la fable de La Fontaine, il serait donc assurément hasardeux de miser sur le vainqueur présumé d’une confrontation d’astuce et de ruse entre le corbeau et le renard. 

Pour toutes ces raisons, les corbeaux, au contraire de bien d’autres espèces dont le déclin est déjà fort avancé, ont les meilleures chances de pouvoir s’adapter à un environnement en mutation profonde. 

Rien que pour cela, ils méritent bien la paix des braves.

L’Intelligence du corbeau.

Une première mondiale

Dans sa volière, l’oiseau dispose d’une brindille accrochée à un bout de ficelle, de trois cages avec des pierres, d’une structure en plexiglas dans laquelle se trouve une autre brindille, plus longue et initialement inaccessible, et enfin la boîte contenant la nourriture. 

C’est, selon le narrateur, la première fois que 007 ( nom de la corneille faisant cette expérience) est confronté à une telle situation, bien qu’il connaisse chaque objet individuellement.

Après un instant d’observation, le corbeau tire sur la corde pour la remonter et récupérer la première brindille, courte, avec laquelle il essaie de récupérer le morceau de viande. 

Mais elle n’est pas suffisamment longue pour lui permettre de tirer vers elle sa friandise. 

Il faut opérer différemment.

Il se dirige alors vers la première cage, et à l’aide de son bâton rapproche le premier caillou, que l’oiseau ramasse et met de côté. 

Même chose pour la deuxième pierre. 

Après ce qui semble être un court instant de réflexion, c’est l’illumination.

Le corbeau 007 récupère le premier caillou et le place dans le dispositif où se trouve la seconde brindille. 

C’est la quatrième étape. 

Il récupère la troisième pierre et la dépose également au bon endroit. 

Puis il retourne chercher le caillou restant et fait de même. 

Sous le poids, le plateau penche, le long bâtonnet tombe et arrive à la portée du bec du corbeau calédonien. 

Celui-ci le récupère et file l’essayer sur la première boîte, qui contient la nourriture. 

Cette fois, il dispose du bon outil pour amener à lui le morceau de viande. 

Le voilà récompensée de ses efforts mentaux. 

Une première mondiale. 

Le tout en environ deux minutes et demie.

007, la corneille savante

Évidemment, l’oiseau ne partait pas de zéro et n’a pas eu à comprendre tous les mécanismes en un instant. 

Il était familiarisé à l’utilisation de la brindille, réflexe assez naturel chez les corvidés, et avait été entraîné à déposer les pierres pour faire basculer le compartiment contenant la grande brindille.

Cependant, cet exercice n’avait jamais été pratiqué tel quel, avec toutes les étapes nécessaires simultanément. 

Il lui a donc fallu utiliser ses expériences passées pour imaginer la solution au problème auquel il était confronté.

On peut voir sur You tube a un sommet d’un toit enneigé, une corneille qui dévale la pente sur un bout de plastique. 

Une malencontreuse expérience ? 

À priori non, puisque l’oiseau remonte son support au sommet et tente une deuxième glissade

Pour en revenir à l’expérience ci-dessus , 007 ne passera pas sa vie en laboratoire. 

À la suite de cette expérience réussie, ses geôliers l’ont libéré et rendu à la vie sauvage. 

Peut-être savaient-ils qu’il aurait de toute façon découvert un moyen de s’échapper… 

Car les corvidés ne manquent pas d’imagination. 

La preuve avec une autre vidéo, plus ancienne,  circulant aussi sur You tube ,qui montre qu’ils aiment s’amuser, de la même façon que nous : en faisant de la luge.

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