Apparemment cela s’est passé en Afrique de l’Est .

Mal aimé de la recherche, l’âne domestique vient de trouver son berceau d’origine

L’âne suscite un intérêt scientifique inversement proportionnel aux services qu’il a pu rendre dans l’histoire des civilisations.

A Toulouse, des chercheurs viennent d’identifier la région du monde où il a été domestiqué.

Bien avant le noble cheval

    1. L’âne a longtemps été boudé par les chercheurs au profit de son élégant cousin, le cheval.

    2. Pilotée par des chercheurs toulousains, l’étude génétique la plus approfondie jamais menée sur les baudets vient de livrer son verdict et de situer où il a été domestiqué pour la première fois.
    3. Ce foyer est en Afrique de l’est et l’âne a commencé à rendre des services à l’homme bien avant le cheval.
    4. Bonnet d’âne, âne bâté, coup de pied de l’âne. On ne peut pas franchement dire que l’âne soit le plus glamour des animaux.
    5. Il est tout juste bon dans l’imaginaire populaire à mourir tout seul au fond d’une étable ou à faire de la figuration.
    6. Peu importe qu’il soit docile, endurant, capable de se coltiner des chargements titanesques et de rendre encore « des services colossaux » dans certaines économies pastorales.
    7. Et cette désaffection générale se retrouve jusque dans les travaux des scientifiques.
    8. « Ces biais de représentation se sont propagés dans la recherche, si bien qu’il y a très peu d’études génétiques sur cet animal alors qu’il y en a énormément sur son cousin très proche le cheval », remarque Ludovic Orlando du Centre d’anthropologie et de génomique de Toulouse(CAGT)*.
    9. Cet « archéologue moléculaire » est bien placé pour faire amende honorable, il est connu pour ses travaux sur les équidés aujourd’hui éteints et sur l’origine de la domestication des chevaux.

Des milliers d’années plus tôt que le cheval

Mais l’heure de la vengeance de l’âne a sonné.

En collaboration avec 37 autres scientifiques mondiaux, l’équipe a mis à profit les techniques développées dans le cadre des recherches sur le noble cheval pour lancer la plus vaste étude génétique jamais produite sur les baudets.

Elle a passé au crible les génomes complets de 207 ânes vivants, du monde entier.

Mais elle a aussi remonté le temps avec 31 ânes anciens, dont un, médiéval, retrouvé près du Vieux Port à Marseille et un autre paissant à la même époque dans une bourgade de la Meuse.

Le groupe vient de publier ses résultats à la une de la célèbre revue Science.

Il y dévoile que, contrairement aux scénarios échafaudés jusqu’ici faute d’éléments concrets et qui laissaient penser qu’il pouvait y avoir plusieurs foyers de domestication, il n’y en a qu’un : « L’Afrique de l’est, plus exactement la corne du continent et au Kenya », précise Ludovic Orlando.

Ce, « il y a 7.000 ans », soit plus de 2.000 ans plus tôt que la domestication du cheval cousin dans les steppes de Russie.

L’équipe relève aussi la coïncidence entre l’apparition du premier foyer de l’âne domestique et la désertification du Sahara au sens large.

« Elle arrive au moment où la région devient moins verdoyante, plus hostile.

Est-ce pour cela que les hommes se sont mis à utiliser une bête robuste comme l’âne ?

C’est un modèle de travail dont nous n’apportons pas la preuve », explique le génomicien toulousain.

« Il reste maintenant à nos collègues archéologues de passer le terrain au peigne fin pour trouver les preuves tangibles de cette civilisation qui a commencé à manipuler l’âne », ajoute-t-il.

En attendant la mule

L’équipe a aussi eu confirmation que dans la Meuse par exemple, même dans l’Antiquité, il y avait déjà chez les éleveurs une science intuitive des croisements génétiques, et de leur rentabilité.

Ils sélectionnaient déjà des ânes hauts au garrot pour les croiser avec des juments et obtenir des mules ayant l’endurance de leurs pères et la rapidité de leurs mères.

Mules, par définition stériles, et dont les Romains ont pourtant fait un instrument de domination de leur gigantesque empire pour déplacer armées ou munitions, ou communiquer des messages.

Après avoir identifié le foyer de domestication du cheval puis maintenant celui des ânes, l’équipe de Ludovic Orlando veut maintenant s’intéresser à la façon dont « les grandes civilisations ont modifié leurs chevaux et leurs ânes », et à expliquer cet engouement des Romains pour les mules qui pourrait avoir une importance bien plus grande qu’il n’y paraît dans le cours de l’histoire.

 

 

 

 

ETUDE  CNRS – Université Toulouse 3 Paul-Sabatier

 

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