Hélas en grande partie à cause de la pauvreté, cette région subit un vrai désastre écologique.

Le lac Victoria, est le plus grand lac d’Afrique et (selon les sources) le quatrième ou le deuxième au monde en superficie avec 68 100 km2.

Il doit son nom à l’explorateur britannique Speke qui fut en 1858 le premier Européen à l’atteindre, et qui le baptisa en l’honneur de la reine Victoria.

Situé en Afrique de l’Est, au cœur d’une zone densément peuplée, il est bordé par le Kenya au nord-est, l’Ouganda au nord et au nord-ouest et la Tanzanie au sud, sud-ouest et sud-est.

Occupant une dépression encadrée par les deux branches de la vallée du grand rift, il est la source du Nil Blanc, le plus long affluent du Nil.

La flore :

La région du lac Victoria est actuellement occupée par des savanes boisées entrecoupées de vastes étendues cultivées.

Dans le Nord s’étendait jadis une grande forêt qui prolongeait celle du bassin du Congo mais il n’en reste plus que des lambeaux.

Jacinthe d’eau.

Dans les zones marécageuses, sur la rive ou à faible profondeur, on trouve différentes espèces comme des Poaceae (Miscanthus violaceus, Leersia hexandra), des sphaignes (genre Sphagnum), une Melastomataceae (Dissotis brazzaei), des roseaux du genre Phragmites, des massettes (genre Typha), des potamots (genre Potamogeton) et des nénuphars (Nymphaea caerulea, Nymphaea lotus).

Le long des berges, à l’abri des vagues, se dresse une importante végétation qui pénètre jusque dans l’embouchure de certains affluents.
On trouve parmi ces plantes le papyrus (Cyperus papyrus), qui atteint quatre à cinq mètres de hauteur.

Le papyrus poussait toute l’année tout le long du Nil il y a quelques milliers d’années mais aujourd’hui, on ne le trouve plus que dans le Sud du Soudan et autour du lac Victoria où il couvre de grandes étendues.

On peut aussi trouver dans les mêmes zones des fougères (Cyclosorus interruptus var. striatus), des ficus (comme Ficus verruculosa) et des plantes de la famille des Limnophyton (Limnophyton obtusifolium).

Dans les zones calmes on trouve des végétaux aquatiques comme l’utriculaire (genre Utricularia), des Hydrocharitaceae (Hydrilla verticillata, genre Vallisneria), la mâcre nageante ou châtaigne d’eau (Trapa natans) dont le fruit est comestible, une Poaceae appelée hippo grass, soit « herbe à hippopotame » (Vossia cuspidata) et des plantes du genre Ceratophyllum.

Toutes contribuent à créer des habitats pour de nombreux petits animaux.

La pistie ou laitue d’eau (Pistia stratiotes) semble avoir disparu à cause de la prolifération d’un autre végétal, la jacinthe d’eau.

LA FAUNE :

Mammifères

Dans les marais à papyrus, l’antilope sitatunga , aux sabots longs et fendus adaptés à la marche en terrain marécageux, peut encore être rencontrée bien que devenue rare.

Une autre antilope, le grand cobe des roseaux (Redunca redunca), peut elle aussi être aperçue sur les rives.

En ce qui concerne les mammifères plus adaptés au mode de vie aquatique, l’hippopotame et la loutre à joues blanches sont courants.

Dans certaines zones autour du lac, on peut aussi apercevoir des impalas ), mammifère ressemblant à une gazelle ou à une antilope et des Cobes à Croissant une grande antilope qui apprécie les zones humides.

Oiseaux

Le lac Victoria est un lieu de passage de très nombreux oiseaux migrateurs mais c’est aussi le milieu de vie d’un grand nombre d’espèces résidentes.

Dans les marais denses, de nombreux animaux trouvent abri et nourriture.

C’est là que vit le Bec-en-sabot qui se nourrit de poissons, de batraciens, de jeunes tortues et qui est actuellement classé comme espèce vulnérable.

On y trouve aussi des oiseaux typiques des marécages à papyrus tel que le Cisticole de Carruthers , la Rousserolle des cannes , le Gobemouche des marais la Bouscarle à ailes blanches et deux espèces menacées, le Chloropète aquatique et le Gonolek des papyrus..

Dans les eaux plus libres, on peut rencontrer l’échasse blanche mais aussi des cormorans (grand cormoran, Phalacrocorax carbo, et cormoran africain, ainsi que divers hérons (le crabier blanc Ardeola idae) et aigrettes (aigrette garzette, grande aigrette).

La mouette à tête grise et la sterne Hansel se rencontreront souvent dans les zones d’eaux libres plus éloignées de la rive.

Dans la savane arborée qui entoure le lac, on peut observer le martin-chasseur du Sénégal , oiseau très coloré appartenant à la même famille que les martin-pêcheurs.

Près de la rive, on peut parfois apercevoir l’œdicnème vermiculé ou bien le barbican guifsobalito oiseau noir à gorge rouge intense, ou bien encore divers souïmangas, oiseaux nectarivores à ne pas confondre avec des oiseaux-mouches, dont le souimanga à ceinture rouge .

L’autour unibande , rapace amateur de lézards, de serpents, de petits mammifères et de jeunes oiseaux, est souvent observé dans ce biotope.

Reptiles et batraciens

Le crocodile du Nil a presque disparu de cette région d’Afrique.

Il est essentiellement victime de la chasse faite pour obtenir sa peau.

Il se nourrit de proies vivantes comme des oiseaux, des lézards, des tortues, des insectes, des crustacés, des mollusques et des batraciens.

Au lac Victoria, la ponte a lieu à la fin décembre et en janvier, à la saison sèche lorsque les eaux baissent.

Les œufs sont déposés dans le sable où ils incubent pendant trois mois.

Le lac abrite plusieurs espèces de tortues d’eau douce endémiques comme Pelusios williamsi ou Emydura victoriae.

Les varans du Nil, qui subissent la prédation du crocodile, n’hésitent pas en retour à piller le nid de ce dernier.

Dans ces zones vivent également des batraciens, notamment une espèce endémique : Xenopus victoriae.

Poissons

Le lac Victoria contient environ 450 espèces de poissons dont 300 endémiques .

La perche du Nil ou Capitaine et le tilapia du Nil ont été introduits dans le lac par l’Homme.

Il existe aussi une espèce de protoptère, ou dipneuste africain , poisson pulmoné obligé de respirer régulièrement à la surface.

Depuis l’introduction de la perche du Nil dans les années 1950 par les colons britanniques, plus de 200 espèces endémiques d’Haplochromis ainsi que l’Oreochromis esculentus ont disparu et de nombreuses espèces sont menacées comme le protoptère qui semble même en voie de disparition.

Insectes

Les eaux du lac Victoria sont colonisées par des insectes aquatiques, les notonectes entre autres, et par de nombreuses larves d’insectes.

On assiste périodiquement au-dessus des eaux du lac à l’apparition de véritables nuages d’insectes.

Ces derniers se forment lorsque les nymphes de certaines espèces (trichoptères, Chaoborus, Simuliidae, éphémères, odonates, chironomes, moustiques, etc.) se transforment en adultes et prennent leur envol.

La majorité sont inoffensifs mais peuvent être gênants pour les habitants du voisinage.

Certains moustiques peuvent transmettre des maladies telles que la malaria, la fièvre à chikungunya et la fièvre jaune.

Sur les rives, des rassemblements périodiques de têtes de bétail attirent la glossine, ou mouche tsé-tsé, capable de transmettre la maladie du sommeil dont le responsable est le trypanosome (protozoaire).

Les simulies peuvent aussi transmettre des maladies due à un nématode parasite (onchocercose, filariose).

Autres invertébrés

Les mollusques sont eux aussi nombreux avec 126 espèces et sous espèces dans le lac dont certaines sont endémiques : gastéropodes (Pila ovata, Bellamya unicolor, Biomphalaria glabrata, Melanoides tuberculatus) et lamellibranches (genres Pisidium, Mutella, Coelatura et Sphaerium).

Le lac Victoria héberge quelques espèces d’annélides, de sangsues et d’oligochètes (comme Alma emini) et des rotifères (genres Brachionux et Anuraenopsis).

Une méduse endémique d’eau douce, Limnocnida victoriae, est également présente dans les zones littorales et des éponges (comme Spongilla nitens) dans les habitats rocheux.

Catastrophe écologique.

Rejet des eaux usées, de produits toxiques provenant des usines ou de détergents à usage domestique, décharges à ciel ouvert, constructions anarchiques sur les marécages qui filtraient autrefois le ruissellement des eaux…

Sans oublier la prolifération d’espèces introduites dans le lac et qui se sont révélées prédatrices.

Comme la perche du Nil, qui s’est mise à dévorer les autres poissons, ou la jacinthe d’eau, originaire d’Amérique du Sud.

Sur plus de 170 km2, ce nénuphar étouffe peu à peu l’oxygène nécessaire à la vie aquatique et bloque la circulation des bateaux.

Les origines du mal sont donc nombreuses.

Toutes renvoient pourtant, d’une manière ou d’une autre, à l’intensification de l’activité humaine.

Et à la pauvreté.

On est passé de 4,6 millions d’habitants autour du lac dans les années 30 à 50 millions aujourd’hui.

Il n’est plus capable de digérer tout ce qu’on y rejette.

Et la surpêche épuise aussi les ressources.

Il y a 200 000 pêcheurs à présent, contre 50 000 il y a quarante ans», constate Frédéric Noy ( grand photographe) , qui refuse de blâmer les populations locales.

«Comment résoudre ce conflit permanent entre un avenir menacé et les besoins immédiats ?

Pour nous, Occidentaux, faire des efforts au quotidien pour l’environnement se résume souvent à des gestes périphériques : trier nos déchets, prendre le train plutôt que l’avion…

Pour les habitants du lac, c’est leur activité principale qui est en cause», dit-il.

Quand l’horizon de la vie est de toute façon limité, pourquoi renoncer à pêcher le plus de poissons possible ?

Le photographe rappelle que, sur ces rives, 23 % de la population est contaminée par le VIH.

Et lorsque l’industrie floricole apporte de l’emploi «pour 8 000 personnes directement et 30 000 indirectement», qui va s’apitoyer sur le rejet des eaux usées dans le lac ?

«Les gens vivent là car il n’y a pas d’autre option pour eux», déplore le photographe, qui s’est parfois senti dans une position inconfortable :

«Mis à part un gouverneur, un ou deux activistes locaux, les inquiétudes viennent le plus souvent des Occidentaux.

Or, dans ces pays longtemps colonisés, il y a encore des susceptibilités.

Et le regard critique des Blancs est fréquemment perçu comme agressif.»

La lente agonie du lac Victoria est-elle irrémédiable ?

Des projets de grandes stations d’épuration sont sur la table.

La Tanzanie et l’Ouganda ont mis en place des brigades lacustres pour lutter contre la pêche illégale.

Une ONG kényane encourage la cueillette des jacinthes d’eau, transformées en nourriture pour le bétail.

Mais lorsque le photographe interroge des femmes sur les détergents toxiques utilisés pour leur vaisselle, il suscite des réactions de surprise amusées : comment quelques assiettes lavées dans l’eau pourraient-elles constituer une menace ?

Le lac est si grand.

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