
Le buffle à grande bouche est l’un des poissons d’eau douce qui vivent le plus longtemps au monde.
Super centenaire, cette espèce étonnante ne montre aucun déclin lié à l’âge, et même des améliorations avec les années.
Mais reste vulnérable à l’activité humaine.
Si la longévité de Jeanne Calment vous fait rêver, son record de 122 ans et 164 jours sur la planète Terre est largement battu… par un poisson.
Capable de vivre au moins 127 ans, le buffle à grande bouche a de quoi inspirer les laboratoires de crèmes anti-âge.
Car en plus de vivre très longtemps, cette espèce ne montre pas de signes de détérioration liée au vieillissement et même au contraire sa santé s’améliore avec le temps.
Ce poisson qui se prend pour un buffle, originaire d’Amérique du Nord, souvent de couleur olive brunâtre, a longtemps été ignoré par les scientifiques.
Ces dernières années, ses incroyables caractéristiques ont été révélées, en même temps que les menaces de disparition qui le guettent.
Le Benjamin Button des poissons
Cette star de l’eau douce peut donc briller sur les tapis rouges aquatiques pendant une centaine d’années, et toujours avec la même vivacité.
Dans une étude publiée dans la revue Scientific Reports en 2021, les scientifiques affirment n’avoir trouvé « aucune preuve de déclin lié à l’âge.
Au lieu de cela, les poissons plus âgés semblaient moins stressés et avaient une plus grande immunité que les poissons plus jeunes, ce qui suggère des améliorations ».
Plusieurs énigmes subsistent encore sur les secrets de leur longévité, mais il est possible que les buffles à grande bouche maintiennent leurs télometres dont le raccourcissement est un signe biologique de vieillissement grâce à une enzyme qui les empêche de raccourcir.
Pour les scientifiques, les changements liés à l’âge qui affectent la condition physique varient grandement selon les espèces.
Même si celle du poisson buffle est extrêmement lente, il n’est pas le seul à défier la faucheuse plus longtemps que les autres.
La même étude évoque ainsi des rats taupes nus vivant plus de 28 ans, environ neuf fois plus longtemps que les souris de taille similaire et avec des changements minimes de physiologie et morphologie.
Les femelles ne montrent même aucune baisse de fertilité jusqu’à la fin de leur vie.
Idem pour certaines espèces de tortues, comme la salamandre tachetée, qui ne présentent aucun signe de perte de vigueur avec l’âge.
Les femelles plus âgées pondent encore plus d’œufs et de manière plus régulière que les femelles plus jeunes.
D’autres espèces marines dépassent également les 200 ans, telles que le requin du Groenland (plus de 270 ans) ou encore la moule perlière d’eau douce, qui peut atteindre, dans certains cas, les « deux siècles », selon le ministère de l’Écologie, dans un rapport de 2011.
Victime des humains
Mais l’espèce au nom folklorique n’est pas infaillible face à la surpêche et le réchauffement climatique..
Une étude de 2022 menée au Canada, aussi publiée dans Scientific Reports , a constaté un nombre alarmant de vieilles générations de poissons par rapport aux jeunes. 99,7 % des poissons échantillonnés (389 sur 390 poissons) dans le lac du Rice, au Minnesota, avaient plus de 50 ans.
La plupart d’entre eux étaient même nés avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec un âge médian de 79 ans.
Une maison de retraite aquatique.
Pourtant, les buffles se reproduisent tous les ans avec succès vers le mois de mai.
Quand vient la fin de l’été, toute trace de ces jeunes poissons a disparu.
Ainsi, depuis plus de six décennies, aucune nouvelle génération de jeunes poissons n’a atteint l’âge adulte.
La théorie des chercheurs et chercheuses est que les buffles à grande bouche sont extrêmement vulnérables à la dégradation de leur habitat, aux espèces envahissantes et la pêche à l’arc, selon une autre analyse parue dans le Canadian Science Publishing.
C’est l’une des plus anciennes populations animales au monde, et il n’existe aucune gestion ni protection de l’espèce », explique Alec Lackmann à la BBC , chercheur en poissons à l’université du Minnesota, et l’un des plus grands experts des buffles à grande bouche.
À l’heure actuelle, personne ne sait à quel point l’écart actuel de 60 ans entre les générations est anormal, ni même quelle pourrait être la durée de vie maximale de ces poissons.
Les scientifiques appellent donc à une « approche de précaution » immédiatement, avec une réglementation de la pêche.
Ainsi, si on a enfin trouvé la fontaine de Jouvence c’était une rivière depuis le début il est encore temps d’empêcher qu’elle s’éteigne aussitôt avec ses secrets.